CRITIQUE
Nicolas Valazza : La fin des livres
par 26/06/2018
·En août 1894 paraît dans le Scribner’s Magazine, une revue new-yorkaise à gros tirage, le récit fantaisiste « The End of Books », écrit par Octave Uzanne et illustré par Albert Robida[1]. Ce texte sera repris quelques mois plus tard en version française, enrichie de plusieurs illustrations de Robida, dans le recueil des Contes pour les bibliophiles d’Uzanne[2]. « La Fin des livres » relate donc une conversation imaginaire entre plusieurs savants au sujet des destinées de l’humanité et de l’évolution des sciences et des arts, à la suite d’une conférence dans laquelle un physicien anglais « avait annoncé que mathématiquement la fin du globe terrestre et de la race humaine devait se produire au juste dans dix millions d’années[3] ». L’un des interlocuteurs prédit ainsi la domination prochaine de l’Amérique sur tous les autres continents, tandis qu’un « naturaliste » utopiste prophétise le retour à l’âge d’or et la restauration d’une nature immaculée, grâce au règlement du problème de la faim à l’aide de poudres et de sirops alimentaires. Cette « prédiction idéaliste » est contestée par un « humoriste » d’obédience darwiniste, qui préconise de suivre « la loi commune qui régit l’évolution du monde » : « En attendant que nous soyons dévorés, dévorons[4]. » Par ailleurs, un esthéticien pronostique la sublimation inexorable de l’art, « enfin rendu à sa propre essence », dans un symbolisme abstrait, cultivé par une aristocratie restreinte d’artistes, cependant que « la photographie en couleur, la photogravure, l’illustration documentée suffiront à la satisfaction populaire[5] ».
Source : Société des études romantiques et dix-neuviémistes.
Laisser un commentaire