Livre et bibliothèques universitaires – Nécessaire inquiétude
Alors que la campagne Sauvons les livres lance son cri d’alarme au monde culturel en bouleversement, on constate que les bibliothèques universitaires elles-mêmes expulsent des milliers d’ouvrages prétendument non consultés pour « faire de la place aux étudiants ». Au nom de l’évolution numérique, est-on en train de démanteler des sanctuaires de lecture et des puits recherche qui furent essentiels à la transmission de la culture depuis la Renaissance ?
Cette fois, les futurologues ne se sont pas trop trompés. Les Alvin Toffler, Pierre Lévy et Nicholas Negroponte, enthousiastes, nous avaient avertis dès le milieu des années 1990 : plus l’Internet se développera, plus tous les secteurs de transmission du savoir et de la culture connaîtront des bouleversements sans précédent.
Littérature – Le fétichisme du livre mis à l’épreuve
Alexandra Briand-Soucy, 23 ans, étudiante à la maîtrise au Département des littératures de langue française à l’Université de Montréal (UdeM), lit beaucoup, beaucoup, mais elle n’a rien de la rate de bibliothèque. D’autant moins que sa bibliothèque universitaire est une sorte de trou à rats, justement, avec ses étagères remplies de livres poussiéreux, souvent inutilisés, des espaces de travail d’un autre siècle, mal adaptés aux équipements électroniques ou au travail en équipe.
Universités – Bibliothèques en crise d’identité
Les étudiants désertent de plus en plus les salles silencieuses des bibliothèques pour le bourdonnant du café du coin, passent de l’emprunt de livres sur les étagères… à la tablette. Résultat ? Les indicateurs de fréquentation et de prêts de livres sont en chute libre.
Et la bibliothèque universitaire est en crise identitaire. Les chiffres le démontrent : outre dans certains cas où on a rénové et usé d’autres ruses pour attirer les étudiants, l’indice de fréquentation des bibliothèques universitaires a une tendance au surplace ou à la baisse. Pas étonnant. Les bibliothèques ne répondent plus aux besoins d’espace, ni aux besoins et aux habitudes d’apprentissage des usagers, croit Loubna Ghaouti, la directrice des bibliothèques de l’Université Laval. « Il y a eu des investissements majeurs dans les bibliothèques universitaires dans les années 60. Ces infrastructures ont vécu, mais depuis que le numérique est entré, elles ont atteint leur niveau de vie utile. »
Sortir les livres pour faire de la place aux étudiants
Vous appréciez le charme suranné et le romantisme des bibliothèques et leurs étalages de vieux livres jusqu’au plafond ? Le virage numérique fait la vie dure à ce modèle et les dépôts muséaux de livres n’ont plus la cote depuis un bon moment déjà. La bibliothèque universitaire du XXIe siècle a maintenant un nouvel objectif qui témoigne de la révolution qui s’opère : sortir les livres pour faire de la place aux étudiants.
« Pour moi, la bibliothèque idéale, elle n’est pas “ physique ”. Je la réaménagerais, je créerais des espaces pour stocker de la documentation semi-active et j’aurais donc des espaces libres pour aménager beaucoup d’espace de travail d’équipe et de travail collaboratif, avec de l’équipement », soutient Lynda Gadoury, la directrice du Service des bibliothèques de l’UQAM. Selon elle, la bibliothèque doit mettre l’usager au coeur de ses priorités.
Les universités en chiffre
Université McGill
15,7 millions de dollars ont été consacrés cette année à l’acquisition de nouvelles ressources documentaires.
12,4 millions de dollars des montants investis dans l’achat des nouveaux documents l’ont été dans le numérique, qui accapare ainsi la part du lion, soit 79 %.
31% Le recul accusé en quatre ans par la circulation des documents imprimés.
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